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Recherches philosophiques qui, inspirées par l'idée du neutre, vont au-delà du scepticisme vers une interprétation moderne et différentielle (historique et intemporelle) du devenir du principe de raison.

Borges et le mythe du cercle

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Un extrait de Borges, Fictions (Mythe et récit) (pages 130 à 140), Ellipses, Marketing, 1988

 

 

   L’expérience de l’éternité, du cercle de l’éternel présent, re­quiert-elle alors le silence ? Il faudrait sortir du temps. Rechercher la source éternelle suppose de faire abstraction de la durée nécessaire à l’homme pour penser et pour tracer un commencement, un devenir, une fin et un retour au commencement. Pourtant le temps circulaire n’est pas la présence de l’éternité, il dure. Il n'est pas la permanence du Tout présent à lui-même.

   Or l’éternité n’est pas seulement le style du dés, un jeu ou un espoir lassé. Borges nous renvoie en fait à une expé­rience précise et exceptionnelle à l’intérieur de laquelle l’inconcevable se révélerait. La plénitude de l’instant éternel lui est en effet apparue comme une image fulgurante et énigmatique. Le support temporel s’est alors effacé pour ne plus «déchiqueter »  l’image de l’identité absolue : "Je me sentis mort, je sentis que je percevais ce monde en spectateur abstrait ; peur indéfinissable pénétrée de savoir, qui est la plus sûre clarté sur la métaphysique. Je ne crus pas un instant avoir remonté les eaux présumées du temps ; je pensai plutôt que j’étais en possession du sens caché ou absent de l’inconcevable mot éternité."  Le vertige de la perte de soi a ainsi rendu possible cette expérience fugitive, cette sug­gestion, cette insinuation d’éternité. Et cette suprême clarté dé­route ! "J’ai eu le sentiment de vivre, non dans le temps, mais hors du temps. J’ignore quelle fut la durée de cette sensation, puisque j’étais hors du temps. Une minute ou deux, peut-être plus… Je fus envahi, je ne sais comment, par l’impression de vivre au-delà du temps, et j’ai tenté l’impossible pour la retenir, mais elle disparut comme elle était venue." 

 

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À propos
claude stéphane perrin

Claude Stéphane PERRIN. Professeur de philosophie à la retraite, j'écris et je lis en méditant sur le problème de la non-violence, notamment à partir d'une idée non indifférente et non nihiliste du neutre .
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