Recherches philosophiques qui, inspirées par l'idée du neutre, vont au-delà du scepticisme vers une interprétation moderne et différentielle (historique et intemporelle) du devenir du principe de raison.
16 Octobre 2014
1. Un extrait de Vivre et philosopher [1] :
Albert Béguin parlait jadis [2] "d'un trait bien connu de l'esprit allemand : le refus de l'universel" (cela malgré Kant et d'autres), et d'un "épouvantable relativisme aboutissant à la glorification de tout ce qui est particulier à l'Allemagne". L'hypernationalisme de Heidegger serait incompréhensible si le Dasein dont il a instauré "l'Analytique" dans Être et Temps avait été un Dasein ouvert à l'universel. Alors aussi Heidegger eût pu prendre la juste mesure d'Auschwitz – ce qu'il n'a jamais fait (n'y a-t-il pas quelque inconscience à écrire – en 1946, dans la Lettre sur l'humanisme : "Peut-être ce qui distingue cette époque-ci réside-t-il dans la disparition de la dimension du salut. Peut-être est-ce là l'unique malheur (Unheil)" ?). Alors aussi eût-il pu parler. Le silence de Heidegger s'explique par un déficit essentiel de sa philosophie - où il n'est pas fait droit à la morale -, et par le caractère tronqué de son analyse du Dasein dans Être et Temps. On dira que devant Auschwitz, l'horreur absolue, le seul langage possible est celui du silence. Soit ! mais ce silence-là n'est pas celui de Heidegger, lequel, pour reprendre des mots de Marx [3], "trouve sa racine la plus profonde dans son insuffisance". Et, quelle que soit la grandeur de Heidegger, cette insuffisance est de nature philosophique.
2. Un extrait de Heidegger par gros temps[1]
Quant à la réaction absolument intime de "honte" et de douleur de Heidegger devant "Auschwitz", comme résumé de toutes les horreurs, elle n'avait pas à être rendue publique, à supporter la détérioration de la publicité et du bavardage. Mais peut-être Heidegger a-t-il dit à Paul Celan le mot attendu, puisque, après leur rencontre à la "hutte", le poète, au dire des témoins, apparut "métamorphosé" et comme "délivré d'un grand poids"[2]. De mon côté, je me borne à essayer de comprendre.
Claude Stéphane PERRIN. Professeur de philosophie à la retraite, j'écris et je lis en méditant sur le problème de la non-violence, notamment à partir d'une idée non indifférente et non nihiliste du neutre .
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